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Supraconductivité non conventionnelle

 

La compréhension de la supraconductivité dans les systèmes à fortes corrélations électroniques tels que les cuprates, les fermions lourds, les matériaux moléculaires, les cobaltites est aujourd’hui l’un des défis majeurs de la physique de la matière condensée moderne car elle remet en question les concepts élaborées au milieu du siècle dernier où la supraconductivité jaillissait d’un état métallique répondant aux critères bien établis du liquide de Fermi. La supraconductivité apparaît dans ces systèmes à la limite d’instabilités électroniques (état hybride issu d’un isolant antiferromagnétique dopé en porteurs de charges dans le cas des cuprates, état magnétique dans le cas des composés à fermions lourds...). La variété de diagramme de phases s’est encore enrichie avec la découverte de supraconducteurs à la proximité d’autres types d’ordres, cette fois souvent en relation avec la charge : ordre quadrupolaire dans le cas des skutterudites (X =Pr,La...), onde de densité de charges dans les dichalcogénures dopés au Cu découverts en 2006, ou fluctuations de valence dans le .

L’interaction responsable de l’appariement électronique dans l’état supraconducteur reste une question centrale. Les phonons et les fluctuations de spins, mais aussi les fluctuations de valence, d’ordre quadrupolaire... sont évoqués. De nouvelles questions théoriques sont posées grâce à la découverte continue de nouveaux systèmes : la supraconductivité a été observée dans des composés dont la structure cristallographique ne possède pas de centre de symétrie comme les composés fermions lourds , , , ou les systèmes à base de métaux de transitions (M= Pt ou Pd). L’absence de la symétrie de conservation de parité pourrait dans ce cas donner lieu à un nouveau type de paramètre d’ordre qui mélange des états singulets et triplets. Dans tous ces systèmes, on s’interroge sur le lien entre les différentes phases en présence : s’agit-il de paramètres d’ordre couplés ou de compétition de phases ?


Les cuprates

Nous savons que dans l’état supraconducteur des cuprates, les paires de Cooper existent et que leur énergie de liaison (communément appelée le gap supraconducteur) est fortement anisotrope avec des régions dites nodales où le gap s’annule et des régions anti-nodales où le gap a une forte amplitude. Nous savons aussi que dans l’état dit "normal" au dessus du dôme supraconducteur, les lois attendues pour un bon métal (loi de Wiedemann-Franz et variation en de la résistivité) ne sont pas vérifiées. Finalement, nous savons qu’à l’intérieur de l’état "normal" il apparaît un état dit de "pseudo gap" ainsi dénommé par J. Friedel pour signifier une suppression partielle des degrés de liberté des porteurs, autrement dit, un régime où les interactions entre porteurs sont suffisamment fortes pour "geler" une partie de leurs excitations. Les enjeux dans ce domaine sont les suivants.
  • A partir de cet état des connaissances, le gap supraconducteur et le pseudo gap sont-il reliés et, si oui, par quel mécanisme ?

     

  • La phase de pseudo gap est-elle un précurseur de la phase supraconductrice, ou bien, la phase de pseudo gap est-elle une phase disjointe de la phase supraconductrice qui entre, au contraire, en compétition avec cette dernière ?

     

  • Le mélange, à l’échelle nanométrique, des phases supraconductrice et pseudo gap observé à basse température par STM est-il un effet intrinsèque de compétition entre deux phases ou bien est-il induit par un désordre sous-jacent ?
 

En réalité, cette question de fond soulève une avalanche de questions annexes qui devront être débattues au sein du GDR comme par exemple la nature de l’état normal des cuprates, le changement de ce dernier en fonction de l’évolution du dopage en porteurs. L’existence ou pas d’un point critique quantique dans le diagramme de phases des cuprates et enfin la question toujours non résolue : quelle est l’interaction responsable de l’appariement électronique dans l’état supraconducteur ? De nombreuses hypothèses sont avancées et au delà des mécanismes plus traditionnels phononiques et magnétiques, il a été proposé un mécanisme basé sur l’existence d’une phase de boucles de courants à l’intérieur de chaque maille élémentaire 1.31. Les fluctuations de cette phase en compétition avec la supraconductivité seraient responsables de l’appariement supraconducteur dans ces composés.

Des résultats français récents, aussi bien théoriques (DMFT sur clusters) qu’expérimentaux (inhomogénéités locales observées en champ proche 1.32, symétrie des excitations en Raman 1.33, oscillations de Shubnikov de Haas sur la nature de la surface de Fermi et diffusion inélastique de neutrons polarisés 1.34) ont modifié notablement notre compréhension du domaine et relancé cette activité.


Supraconductivité multibande ?

Dans le composé , ce sont les différentes constantes de couplage électron-phonons de chaque bande qui entraînent un gap supraconducteur distinct sur chacune d’entre elles. Les propriétés physiques de ce système sont maintenant bien comprises par un formalisme de gaps couplés. Aujourd’hui, de nouveaux systèmes présentant le même type de phénoménologie sont découverts. Dans ces systèmes le caractère multigap de la supraconductivité provient de mécanismes microscopiques fondamentalement différents de ceux de . En effet, dans les skutterudites remplies, telles que le composé à fermions lourds , ce serait la coexistence de bandes d’électrons lourds et légers qui pourrait donner lieu aux comportements multigaps observés. Dans une onde de densité de charge sur une partie d’une des bandes électroniques pourrait affaiblir le gap supraconducteur. Encore une fois dans la plupart des cas les questions fondamentales restent posées : quelle est l’interaction responsable de l’appariement électronique dans les différentes bandes et quel lien existe entre celle-ci et les mécanismes qui différencient les bandes ?

Importance de nouveaux composés

La supraconductivité non conventionnelle apparaît en général à la proximité d’un état magnétique.

Il est important de noter le rôle crucial que joue dans ces problématiques la découverte continue de nouveaux matériaux. En effet, c’est souvent grâce à de nouveaux systèmes que de nouvelles questions sont posées.

Ainsi la découverte de la supraconductivité dans les oxydes de cobalt ou les -pyrochlores supraconducteur (X =K, Rb, Cs) repose la question du rôle des fortes fluctuations magnétiques dans les composés géométriquement frustrés et en particulier leur rôle dans la mécanisme d’appariement des paires de Cooper. Une nouvelle famille de composés permettant de passer continûment d’un ordre supraconducteur à un ordre antiferromagnétique en appliquant une pression, un champ magnétique ou en changeant la composition a été récemment découverte dans les fermions lourds : la famille des 115 ( R=Co,Ir, ou Rh). Ainsi il devient possible d’observer le changement d’état magnétique / supraconducteur à T=0K, et de le confronter aux théories de transitions de phases dans les systèmes à fortes corrélations électroniques. 

De même la découverte en 2001 des supraconducteurs ordonnés ferromagnétiquement, et , permet d’explorer expérimentalement une supraconductivité dont le second champ critique dépasse la limite de Pauli signant très probablement une supraconductivité de type triplet (paire de Cooper de spins parallèles).

La supraconductivité a aussi été observée dans des composés dont la structure cristallographique ne possède pas de centre de symétrie (métaux de transition (M= Pt ou Pd) etc. ou fermions lourds , , etc.). L’absence de la symétrie de conservation de parité pourrait donner lieu à un nouveau type de paramètre d’ordre qui mélange des états singulets et triplets.

C’est aussi les progrès dans l’élaboration et la caractérisation des composés connus et les avancées instrumentales (notamment au niveau des spectroscopies résolues en impulsion et en énergie, microscopies à champ proche...) qui nous permettent de tendre vers une meilleure compréhension théorique des systèmes supraconducteurs mais plus généralement des systèmes à fortes corrélations électroniques.

Nous proposons dans ce GDR de renforcer les liens qui unissent les physiciens travaillant sur différentes techniques expérimentales et différentes familles de composés pour créer une plate-forme nationale de mise en commun des résultats marquants dans les supraconducteurs. Il s’agit aussi de renforcer les collaborations entre chimistes et physiciens indispensables au progrès dans la synthèse, à la découverte de nouveaux systèmes et à l’étude des propriétés électroniques de ces matériaux. Enfin les avancées expérimentales et la précision dans les mesures sont telles que le dialogue entre expérimentateurs et théoriciens est devenu très fructueux et ce GDR a justement un rôle important à jouer pour renforcer ces discussions.