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Magnétisme
Dans le domaine du magnétisme plusieurs sujets ont émergé ces dernières années, tant dans la communauté française qu’internationale, citons par exemple les composés multiferroïques ou les composés magnétiques où frustration et effets quantiques pilotent les propriétés de l’état fondamental. D’autres sujets se sont affirmés comme centraux à nombre de systèmes fortement corrélés, comme celui des points critiques quantiques.
Les composés multiferroïques couplent des propriétés ferroélectriques et magnétiques. La compréhension de ce couplage, de son origine microscopique, le design et la synthèse de matériaux présentant un fort effet représente un grand intérêt et un défi pour la physique et la chimie fondamentale, de plus les résultats issus de ces travaux sont très attendus pour les applications en spintronique en particulier associés à des études visant à reproduire ces propriétés des matériaux massifs dans des systèmes nano-structurés. Que les composés présentent des propriétés multiferroïques propres (BiFeO3. . .) ou impropres (RMn2O5, RMnO3, CuFeO2,. . .) la compréhension des relations structure - couplage magnéto-électrique est essentielle dans ces systèmes. Les questionnements concernent aujourd’hui l’origine microscopique du couplage magnéto-électrique (magnéto-striction, spin-orbite, effets des ordres orbitalaires etc...), l’influence de la nature du métal de transition ou des ligands sur ce couplage, l’influence de la structure cristallographique (frustration géométrique versus magnétisme frustré). Par ailleurs, l’étude des aspects dynamiques (modes hybrides, électromagnon) est en pleine émergence 10 et la compréhension de ces modes constitue un défi pour la communauté. Il existe en France une communauté importante et dynamique impliquée dans l’étude de ces systèmes à la fois du point de vue expérimental (synthèse, diffusion X, neutron, Raman, imagerie magnéto-optique, microscopie. . . ) que théorique (symétrie, dynamique. . . ) en laboratoire ou sur grands instruments (synchrotron Soleil, ESRF, LLB, ILL. . . ). Enfin, la ferroélectricité dans les matériaux moléculaires, dont l’origine est elle aussi liée aux corrélations électroniques fortes, constitue un champ d’investigation totalement nouveau dans le domaine des systèmes ferroélectriques. La compréhension de ce phénomène intéresse une large communauté en France, allant de la synthèse (Angers, Rennes) aux études expérimentales par RMN, transport, RPE, diffusion X ou neutrons (Orsay, Grenoble, Bordeaux). L’existence d’un espace de discussion et de collaborations comme le GDR est importante pour mieux approcher toutes ces problématiques et être encore plus compétitifs au niveau international. Divers exemples de collaborations fructueuses directement imputables au GDR ont déjà donné lieu à des résultats 11, ou des projets ANR12.
Dans le domaine des composés à magnétisme frustré ou des composés modèles quantiques, l’activité française s’est inscrite entre 2005 et 2010 dans le cadre du réseau européen « Highly Frustrated Magnetism » de l’European Science Foundation et du GDR HFM. Les colloques internationaux ont permis la création de nouvelles collaborations tant au niveau européen que français. A l’heure actuelle, aucun prolongement de ce type de réseau n’est à l’ordre du jour et, bien naturellement cette activité va rejoindre en force le GDR MICO. L’activité dans ce domaine a été marquée au cours de ces dernières années par la découverte du premier kagomé quantique dans l’Herbertsmithite 13 et les développements théoriques importants qu’ils ont suscités 14, par les travaux sur les réseaux pyrochlores 15 avec entre autres la glace de spins—un système modèle dont les excitations obéissent aux mêmes lois que celles de l’électromagnétisme pour les monopoles magnétiques — par la découverte de phases exotiques dans des systèmes quantiques frustrés — lorsque le gap de spin est fermé par un champ magnétique — ou bien par le renouveau de la physique des composés à géométrie triangulaire avec les travaux récents sur les composés à couches CoO2 16. A l’échelon national, nous possédons de nombreux atouts avec une palette expérimentale riche (neutrons, RMN, μ-SR, mesures thermodynamiques, champs forts, synchrotron,. . .) pour des études fines de structures, sous basses températures ou fortes pressions, des équipes de théoriciens de haut niveau (Toulouse, Grenoble, Paris) ainsi que des équipes de synthèse ; ces dernières étant sans doute encore trop peu nombreuses dans ce domaine pour atteindre la taille critique d’un pôle chimie suffisant par rapport à la communauté des physiciens. La thématique du magnétisme frustré n’a cessé de s’amplifier au cours des cinq dernières années en Europe et au Japon. On peut citer quelques axes directeurs pour la recherche 17 dans ce domaine dans les années qui viennent :
- composés triangulaires quantiques à état liquide de spin. Alors que l’on pensait le problème résolu, un ordre de Néel à 3 sous-réseaux 18, certains composés organiques 19 proches de la transition métalisolant ont permis de stabiliser un état liquide de spin. Un cuprate triangulaire semble aussi avoir des propriétés originales et pourrait s’avérer être un liquide de spins 20.
- composés kagomé quantiques à réseau parfait. Pour ce problème le défi est résolument du côté de la chimie. Le réseau kagomé quantique à spins 1=2 est un des systèmes modèles dont les théoriciens essaient depuis 20 ans de déterminer la nature de l’état fondamental. La découverte d’un comportement liquide de spin dans l’Herbertsmithite — qui reste malheureusement imparfaite — a fait exploser les travaux expérimentaux et de nombreuses variantes sont maintenant synthétisées pour tenter de répondre à la question toujours ouverte. C’est sans doute par la croissance cristalline de ce type de cuprate que passeront les progrès dans les années à venir. Une autre piste très novatrice, et dont la marque de fabrique est française, est portée par les réseaux kagomé de terres rares 21, même si les interactions magnétiques restent faibles.
- phases exotiques quantiques. L’essentiel de ces activités est actuellement associée à la fermeture du gap qui nécessite des champs magnétiques intenses, disponibles uniquement à Grenoble 22.
- les composés pyrochlores. Leur étude se poursuivra puisque la compétition entre dipolaire, échange et anisotropie introduit un foisonnement de phases originales dont beaucoup restent à explorer. Si pendant longtemps l’étude est restée limitée aux titanates, les stannates ont plus récemment apporté leur lot de surprises : glace de spin ordonnée 23, persistance de fluctuations dans les états ordonnés 24.
quantiques dans les systèmes à fortes corrélations électroniques où le magnétisme est au moins partiellement contrôlé par les électrons itinérants 25. Ces points critiques quantiques, définis comme points critiques — issus d’une ligne de transitions de phases du second ordre — à température nulle (température à laquelle les fluctuations quantiques doivent jouer un rôle dominant) sont étudiés tant au niveau théorique qu’au niveau expérimental. Pour cela des sondes microscopiques capables de caractériser les fluctuations magnétiques 26 sont utilisées, ainsi que des mesures thermodynamiques ou de transport permettant de préciser le régime critique 25 27. Les points critiques quantiques sont très étudiés dans les fermions lourds, où l’accessibilité des gammes de température, pression, champ magnétique permet les études expérimentales les plus complètes. Ainsi des effets physiques spectaculaires ont été mis en évidence : fort renforcement des masses effectives à l’approche du point critique quantique 27, effondrement des lois physiques simples caractérisant le régime liquide de Fermi des métaux, possible changement de la surface de Fermi de part et d’autre du point critique quantique, changement associé à un basculement d’un régime de magnétisme plutôt localisé à plutôt délocalisé, etc. . .L’étude des points critiques quantiques met à jour les limites actuelles de notre compréhension des systèmes à fortes corrélations électroniques, et forme donc le creuset des nouveaux concepts proposés pour en repousser les limites. Enfin, la problématique des points critiques quantiques s’est avérée centrale notamment en ce qui concerne la question de l’implication d’instabilités magnétiques dans le mécanisme d’appariement supraconducteur, tant pour les fermions lourds (où la situation est assez claire de ce point de vue 28) que pour les cuprates, les organiques et plus récemment, les pnictides.
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